14 septembre 2010

Une dictature douce

Dans "De la démocratie en Amérique", Alexis de Tocqueville (180(-1859) décrit cet autoritarisme «plus étendu et plus doux», qui « dégraderait les hommes sans les tourmenter ». Ce nouveau pouvoir, pour lequel, dit-il, « les anciens mots de despotisme et de tyrannie ne conviennent pas », transforme les citoyens qui se sont battus pour la liberté en « une foule innombrable d'hommes semblables (, .. ) qui tournent sans repos pour se procurer de petits et vulgaires plaisirs, ( ... ) où chacun d'eux, retiré à l'écart, est comme étranger à la destinée des autres ». Isolés, tout à leur distraction, concentrés sur leurs intérêts immédiats, incapables de s'associer pour résister, ces hommes remettent alors leur destinée à « un pouvoir immense et tutélaire qui se charge d'assurer leur jouissance (. .. ) et ne cherche qu'à les fixer irrévocablement dans l'enfance. Ce pouvoir aime que les citoyens se réjouissent, pourvu qu'ils ne songent qu'à se réjouir. Il pourvoit à leur sécurité, facilite leurs plaisirs. Il ne brise pas les volontés mais il les amollit, il éteint, il hébète.» C'était une sorte de prophétie, mais nous y sommes aujourd'hui, même si l'évocation du "pouvoir immense et tutélaire" fait sourire, une analyse actuelle mettant en évidence que ces mécanismes de pouvoirs sont plus complexes et moins manichéens, - ou pire - qu'au contraire plus aucun pouvoir ne contrôle plus rien.

Lu dans :
Pourquoi l'Europe vire à droite. Raffaele Simone. Le Monstre doux. Le MOnde Magazine. 11 septembre 2010. p.20

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