27 février 2009

L'ivresse des cîmes

«Une fois que devenu Monarque il eut atteint les sommets, il ressentit l'ivresse des cimes, cet air raréfié qui chamboule jusqu'aux plus avertis, et là, dans cette contrée où rien ne pousse, si pelée, si glaciale, il se concentra sur lui-même en effaçant le monde, non point par la pensée car il en ignorait les ressources, mais par le puissant désordre de ses actes.»
Patrick Rambaud


On retrouve les accents de ce court texte qui parlait des "sommets extrêmes, là où ne survivent que les reptiles et les rapaces" (référence perdue, snif). Patrick Rambaud poursuit, à la manière des Caractères de La Bruyère, sa description littéraire de la France des années blingbling. 

 Lu dans:
Patrick Rambaud. Deuxième chronique du règne de Nicolas Ier. Grasset & Fasquelle. 176 p. 2009. 

Bonheurs possibles

"Il est séparé de tout et uni à tout.
Impassible et d'une sensibilité souveraine.
Déifié, et il s'estime la balayure du monde.
Par-dessus tout, il est heureux.
Divinement heureux."
Évagre le Pontique.
 
Lu Dans
Les mille nécessaires. Jean Michel Varenne. Dangles. 2000. 160 p. Extrait p.147

25 février 2009

Iles de silence dans le temps enfoui

"Sont féminins (ndlr. en latin) femmes et villes,
arbres, pays et les noms d'îles ."
 D'un refrain mnémotechnique de la classe de latin.

 Comme Marie Rouanet, j'aime "la douce chair des villes, le fil des trottoirs, les passages piétons, les magasins qui ont plusieurs entrées sur des rues différentes, les places et les statues, les vitrines", et par-dessus tout les cimetières, les musées et les églises, ces "îles de silence qui permettent de marcher dans le temps enfoui" sous la cité. Après trois ou quatre jours de repos au vert, j'aime plus que tout retrouver Bruxelles et ses quartiers à nul autres pareils: ils sont mes vraies vacances. 


Lu dans
Marie Rouanet, Dans la douce chair des villes. Payot, 2000, 192 p, extraits  p. et p. 19. 

24 février 2009

Ne dites pas à ma mère que je joue à Boston...

"Celui qui est le même à l'égard de l'ami et de l'ennemi, et ainsi qu'à l'égard de l' honneur et du déshonneur, qui demeure dans le froid et le chaud, le plaisir et la douleur, libre d'attachement, égal dans le blâme et la louange, silencieux, content de tout - quoi qu'il arrive -, sans demeure fixe, la pensée ferme, plein de dévotion: cet homme m'est cher."
Bhagavad-Gîtâ, XII, 18- 19


Un violoniste perdu dans le métro de Washington, en janvier. Musicien de rue, il joue pour quelques pièces, en quête d'un peu d'attention. Un millier de personnes, passent, se bousculent, ne s'attardent guère. Il fait froid et il joue sans partition depuis trois quarts d'heure: Bach, Schubert, Ponce, Massenet. Sept personnes se sont arrêtées un court moment, un enfant de trois ans s'est attardé admiratif, une femme lui adresse un mot aimable à la fin. Quelques maigres dollars lestent la housse de son stradivarius (1713) de 3,5 millions de dollars, que Joshua Bell remballe avec précaution. Hier il jouait les mêmes morceaux à Boston devant une salle comble, à cent dollars la place, il a  occupé les plus belles scènes du monde et accompagné de prestigieux orchestres, mais la beauté sortie de son cadre est-elle soluble dans un environnement inapproprié? Et chacun de nous demain, combien d'instants superbes croiserons-nous sans même nous y arrêter? 

Lu dans:

21 février 2009

L'éclipse

 L'Éclipse

Derrière l'Arc-En-Ciel
Se cache le Soleil,
Dans de lointains horizons,
Couleur passion.

Tel un phénomène
Qui n'arrive que très rarement,
Regardez au ciel,
L'Éclipse au firmament.

C'est la désolation...
Une ignoble trahison...
Telle une bombe
Qui fait éclater la maison,
Me brisant le cœur
Et mettant un terme à mon union.

Comment puis-je croire à un vrai bonheur,
Puisqu'elle possède la clef de son cœur ?
À quoi bon rester là et attendre,
Puisque le glas c'est fait entendre ?

La noirceur s'est emparée de mon âme
Et je n'ai que des idées infâmes.
Je ne sais plus ce qu'est la vérité,
Comment fera-t-il pour me l'avouer ?

Où il y a danger, il y a risque,
Tout comme le Soleil et l'Éclipse.
La vérité pourrait-elle l'aveugler ?
Mais qui de nous sera le premier ?
Est-ce le Soleil, ou l'Éclipse éplorée ?

Il n'y a pas d'avenir dans le passé,
Je ne crois plus au futur, désolée.
Les aiguilles ont tourné...
Le temps s'est arrêté...

C'est maintenant l'heure de faire le point,
Marcherons-nous encore sur le même chemin ?
Toi et moi, main dans la main ?
Ou chacun de notre côté, le regard au ciel ?
Toi, le Soleil, moi l'Éclipse, au gré de l'Arc-En-Ciel ?

Quoi qu'il adviendra de nous,
Le monde entier s'en fout,
Mais dans mon âme et dans mon cœur,
J'espère toujours le parfait bonheur...

Patricia Laroche
Merci à Michel Vasteels qui me communique le texte dont est extrait la phrase d'hier.

20 février 2009

Un passé anonyme

"Il n'y a pas d'avenir dans le passé."  
 
Désolé pour l'absence de référence, j'ai lu la phrase hier et ne sais plus où. Elle reste belle tout de même.

  

19 février 2009

Rencontre du soir

"J'ai pris l'habitude, à tout instant, en dehors des lectures suivies, de tirer un livre au hasard pour une demi-heure de loisir, et de lire, d'entrer en contact avec un esprit du passé, ne fût-ce qu'un instant. J'ai vécu dans le commerce quotidien d'une élite de penseurs qui ont eu une vie autre que la mienne, d'autres formations, d'autres goûts, d'autres tendances, d'autres partis pris, d'autres vérités. La multiplicité de ces lectures diverses m'a assoupli l'esprit. À leur donner raison tour à tour, parce que je comprenais leurs points de vue, j'ai gagné une extra-ordinaire tolérance, j'ai perdu certaines assurances d'ignorant, j'ai beaucoup compris, et j'ai jugé de tout avec plus d'impartialité."
Roger Martin du Gard



18 février 2009

Crise funeste, crise heureuse

 "Crise heureuse. Crise funeste. Une opinion astrologique et fausse a attribué une influence à la lune sur les crises. Après cela nous [la terre] pouvons bien prétendre à envoyer des influences à la lune et à donner des crises à ses malades. "
Bernard le Bouyer de Fontenelle, Mondes, 2e soir.


Pour sauver les banques, en quelques mois, les chefs d'État des pays les plus riches ont été capables d'organiser plusieurs Sommets et de mobiliser plus de 2300 milliards d'euros. Mais qu'a-t-on fait pour sauver la moitié de l'humanité qui vit dans la pauvreté? Pratiquement rien. Pourtant, selon les Nations unies, avec un montant cinquante fois moindre, on pourrait fournir de l'eau potable, une nourriture équilibrée, des services de santé et une éducation élémentaire à chaque habitant de notre planète.
(Programme des Nations unies pour le développement (PNUD), dans son rapport annuel de 1998, selon lequel il suffirait de 40 milliards de dollars pour éradiquer la grande pauvreté dans le monde).
 

Lu dans
Ignacio Ramonet. Le Krach parfait. Crise du siècle et refondation de l'avenir. Galilée. 2008. 145 p. extrait p.29

17 février 2009

L'immensité de ce qu'on ne possède

"Quelle étrange chose que la propriété, dont les hommes sont si envieux! Quand je n'avais rien à moi, j'avais les forêts et les prairies, la mer et le ciel ; depuis que j'ai acheté cette maison et ce jardin, je n'ai plus que cette maison et ce jardin."
Alphonse Karr 

16 février 2009

Toucher le ciel

"Poser le doigt sur un corps humain, c'est toucher le ciel."
Novalis
 ... ciel tourmenté de nuages bretons, ciel bleu andalou, ciel gris de gris, ciel de brouillard, ciel de soleil, ciel d'orage, ciel de coucher de soleil, ciel d'aube, ciel d'angélus de midi, ciel d'horizon de mer. Poser le doigt sur un corps humain, c'est entrer à la fois dans une histoire et dans un paysage. 

Lu dans
Charles Juliet . Ces mots qui nous nourrissent et nous apaisent. P.O.L.2008, 235 p., extrait p.107 

15 février 2009

De l'eau, de l'eau et pas une goutte à boire

"Notre planète Terre devrait s’appeler Mer."
E. Orsenna.
Water, water, everywhere,
And all the boards did shrink;
Water, water, everywhere,
Nor any drop to drink.

De l’eau, de l’eau, de l’eau, partout de l’eau,
Et les planches racornissaient ;
De l’eau, de l’eau, de l’eau, partout de l’eau,
Et pas une goutte à boire.
Samuel Taylor Coleridge. The Rime of the Ancient Mariner (La complainte du vieux marin)

Nous sommes tous des marins de Coleridge. Cartes et satellites sont formels: notre planète Terre devrait s’appeler Mer, tant les divers océans et autres Méditerranée ou Caspienne occupent de surface (71% de notre globe). Et 40 % de la population mondiale vivent à moins de 70 kilomètres d'un rivage marin. L’eau nous entoure, mais c'est une eau que nous ne pouvons boire.
  
Lu dans
L'avenir de l'eau. Erik Orsenna. Fayard. Arthème Fayard. 2008. 410 p. Extrait p.221

14 février 2009

La chair du texte

"Empoigner un texte, faire resurgir au présent la voix du poète, et faire en sorte, en donnant chair à ses mots, que l'encre ne soit plus sèche."
Jean Liermier. Metteur en scène de Candide au Théatre de Carouge - Atelier de Genève.

Belle définition d'Entre café et Journal je trouve
 

Lu dans
Candide revisité. Marie Baudet. La Libre. Culture. 14.2.09, p 22
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11 février 2009

Le vin est l'avenir de l'eau

"Nous nous promenions parmi les fruits, nous voici dans la forêt, à humer des sous-bois. Le gibier n'est pas loin. Bientôt nous plongerons dans la terre, en nous approchant de la truffe. Et voici que nous partons pour une nouvelle escale, la réglisse. D'autres vont suivre. Heureusement que notre planète est ronde, nous ne reviendrions jamais. Et puis, brusquement, alors que vous croyiez avoir épuisé tous les plaisirs connus, vous arrive un miracle, une caresse, une douceur, le souffle d'un pétale de rose juste avant qu'elle ne fane. De tout cœur, je vous souhaite ce voyage une fois, rien qu'une fois dans votre vie."
Erik Orsenna.


Les amateurs de vin auront reconnu la description d'un Romanée Conti,  le vin le plus cher du monde si on en croit Wikipedia qui le décrit rubis sombre, carminé avec l'âge, diversifié et ample au nez avec arômes de petits fruits rouges et noirs, de violette, d'épices, de sous-bois. Bouche puissante, délicate, franche, complète, subtile, flamboyante. Il se garde entre 20 et 40 ans. Une bouteille (75cl) de Romanée Conti 2005 est actuellement en vente aux Galeries Lafayette à Paris pour 18.000 €. Pas de doute possible: pour Erik Orsenna qui le décrit dans son dernier ouvrage, l'avenir de l'eau passe... par le vin. 
 
Lu dans:
  1. L'avenir de l'eau. Erik Orsenna. Fayard. Arthème Fayard. 2008. 410 p. Extrait p.317.
  2. http://fr.wikipedia.org/wiki/Romanée_Conti

10 février 2009

09 février 2009

La mer adoucie

"L'eau salée de la mer, aspirée par le nuage, devient eau douce.
Ainsi la pensée quand elle s'élève."
Saraha
 Saraha (ou Sarahapa or Sarahapāda) (VIIIème s.), connue aussi sous le nom de Rāhula ou Rāhulbhadra, est considérée comme le premier poète d'Inde par Mahapandit Rahul Sankrityayan (1893 – 1963, célèbre érudit indien, renommé pour l'étendue et la diversité de ses connaissances). 
 

08 février 2009

Longueur du temps

« Pas un ne se demande s'il vit bien, mais s'il aura longtemps à vivre. Cependant tout le monde est maître de bien vivre ; nul, de vivre longtemps. »
SÉNÈQUE 


Lu dans
Epictète. Lettres. 22, 17

07 février 2009

L'avorton de la déesse

"La Déesse est visiblement exaltation de la vitre, et la tôle n’y est qu’une base. Ici, les vitres ne sont pas fenêtres, ouvertures percées dans la coque obscure, elles sont grands pans d’air et de vide, ayant le bombage étalé et la brillance des bulles de savon, la minceur dure d’une substance plus entomologique que minérale."
Roland Barthes
Ce matin, ma déception est proche de celle du jour où j'appris qui était Saint Nicolas. Ainsi donc la résurrection promulguée par Ciroën de la DS, sa voiture mythique des années 1955-1975 à la suspension hydraulique légendaire et à la carrosserie dessinée par Flaminio Bertoni, n'était qu'une fade opération de marketing. Des mots, pour faire rêver. Le fantasme des golden sixties a fait place à ce petit crapaud qu'on nous a fait découvrir ce jeudi, espèce d'avorton d'une déesse et d'un insecte rampant. Le passé n'est pas une garantie, et Bertoni doit se retourner dans sa tombe en découvrant la supercherie. Dans son garage dans l'au-delà se reposent une Traction, une Deuche et une déesse ailée, riant sous cape de ce qu'est devenue leur descendance. 

Lu dans
Roland Barthes. Mythologies. Seuil, 1957.

06 février 2009

Un moment créatif

"Ce n'est pas tant le chant qui est sacré, c'est le lien qu'il crée entre les êtres."
Philippe Barraqué


Je reviens un moment sur la vidéo de YouTube où l’on voit (et entend) des musiciens de rues de différents pays chanter chacun à sa façon “Stand by me “, une chanson popularisée par Ben E. King en 1961. Depuis son placement sur YouTube, la vidéo a été vue plus de 5 millions de fois. Le Huffington Post raconte l’histoire de cette version et Wikipedia donne une liste de musiciens l’ayant enregistrée depuis 1961. Les musiciens de rue n’ont pas grand chose à leur envier. Ils sont une trentaine à avoir participé à Santa Monica, Toulouse, Barcelone, Caracas, Moscou, l’Afrique du Sud et le Nouveau Mexique, entre autres. Chacun a contribué en ajoutant une couche à l’ensemble qui se fond de façon surprenante. La vidéo a été produite par “Playing for change ” (ça me rappelle quelque chose) une sorte de mouvement musical pour la paix. Un moment créatif à partager: l'expression artistique connaît elle aussi ses mutations en cette étonnante époque que nous vivons. 
 
Je vous souhaite une bonne semaine
CV. 

04 février 2009

Stand by me

When the night has come
And the land is dark,
And the moon is the only light we'll see.
No I won't be afraid,
Oh I won't be afraid,
Just as long as you stand, stand by me
So darlin' darlin' stand by me,
Oh stand by me,
Oh stand, stand by me, stand by me.

If the sky that we look upon
Should tumble and fall,
Or the mountain should crumble to the sea.
I won't cry, I won't cry,
No I won't shed a tear,
Just as long as you stand, stand by me.
And darlin' darlin' stand by me,
Oh stand by me,
Whoa stand now, stand by me, stand by me.
Darlin' darlin' stand by me,
Oh stand by me,
Oh stand now, stand by me, stand by me. 
Whenever you're in trouble just stand by me,
Oh stand by me,
Whoa stand now, oh stand, stand by me.

Quand la nuit vient
Et que la terre la terre s’éteint,
La lune pour seule lumière.
Non je n’aurai pas peur,
Je n’aurai pas peur,
Aussi longtemps que tu seras
Que tu seras auprès de moi
Ma tant aimée reste auprès de moi
reste auprès de moi
reste auprès de moi

Si le ciel que nous regardons
Devait s’effrondrer en craquant,
Ou
 la montagne s’écrouler dans la mer
Je ne pleurerai pas, Je ne pleurerai pas
Je ne pleurerai pas
Aussi longtemps que tu seras
Que tu seras auprès de moi
Ma tant aimée reste auprès de moi
reste auprès de moi
reste auprès de moi
dans la difficulté
reste auprès de moi
à l'heure actuelle,

Ma tant aimée reste auprès de moi
reste auprès de moi
reste auprès de moi
reste auprès de moi

Ben E. King

Et si nous redécouvrions l'inoubliable Stand by me de Ben E. King (1961), inspiré d'un gospel écrit en 1905, réécrite et réinterprétée sur tous les continents comme le suggère cette superbe vidéo. Cinq minutes de pur bonheur. 

 

Cinq minutes de pur bonheur

02 février 2009

Le passé n'est pas une garantie

"Le taux d'intérêt garanti s'élève à 3%, jusqu'à communication d'un nouveau
taux."
Fiche info financière de Crest Classic.


Un taux annoncé garanti en début d'année n'est plus définitif, les noms des comptes changent aussi: Crest 10 devient Crest Classic, First migre vers Top First. Un patient "confortable", ancien cadre d'assurance lui-même, me dit qu'il ne comprend plus bien les clauses modifiées dans son contrat et qu'il me fait lire. Il se demande si ces conditions seront plus intéressantes que les anciennes, notamment celle incluant "3%, jusqu'à communication d'un nouveau taux". Je ne m'avance guère, mais ressens comme un doute, que je ne lui partage pas. L'époque des contrats à vie, jusqu'à communication d'un nouveau contrat, est annoncée.

Lu dans :Le Soir Economie. Le passé n'est pas une garantie. 31.1.2009. p.5

01 février 2009

Le temps, une denrée rare

"Le temps est la seule denrée vraiment rare; et celui qui contribue, par son travail, à en augmenter la disponibilité et à lui conférer sa plénitude doit être particulièrement
bien rémunéré."
Jacques Atali


Utopie? L'histoire s'est construite par elles. Comme le conclut Jacques Attali dans son dernier essai, espérons que la crise actuelle donne naissance à "un monde où les seules crises seront celles de la vie privée avec ses chagrins et ses joies, ses rassurantes routines et ses glorieuses surprises." 

Lu dans:
La crise, et après? Jacques Attali. Fayard. 2008. 210 p. extrait p.194 195